Écoutons – surtout dans notre situation sociale et politique actuelle – un instant Eugène Ionesco alors qu'il parlait avec André Coutin en 1978 sur les thèmes du dogmatisme et du fascisme. Mon impression est que les simples mots du dramaturge détiennent la clé pour résoudre ce qui pourrait être la cause essentielle de développements politiques indésirables.
« ON NE CHANGE PAS; la situation change. On peut être mis dans des conditions meilleures ou pires, c’est toujours moi qui suis au milieu, le même dans mon essence intime.
« Je crains la réalisation généralisée de l'utopie. Je dois développer cette idée. J'ai peur d'une transformation de l'homme, d'une mutation de l'humanité. L'idéal égalitaire est l'une des expressions de ce danger. »
Dans les semaines à venir, mon hommage à Eugène Ionesco fêtera ses 25 ans. Le souvenir de ce qu'Eugène Ionesco a communiqué à travers ses œuvres et au-delà me semble aujourd'hui plus important et aussi plus inutile que jamais.
Aujourd'hui j'ai le besoin de citer Eugène Ionesco, qui écrivait en février 1961 dans « Notes et contre-notes » sur l'état de l'art et du théâtre, mais en même temps sur l'homme moderne, sur l'utilité de l'inutile et les « rhinocérites à droite, à gauche ». La raison en était une représentation de « La Cantatrice Chauve » près de chez moi. Un spectacle dont les détails transmis par les médias suggèrent une fois de plus un théâtre politisé, quelque chose qu'Eugène Ionesco a toujours méprisé. Apparemment, on cherche en vain des liens avec la désarticulation du langage de notre temps et la désarticulation du monde. Laissons parler un instant Eugène Ionesco, « Notes et contre-notes », pages 210-213 :