Interview
A la fin des années 80 le correspondant de la 'ARD', modérateur des 'Tagesthemen' et ami d'Eugène Ionesco, Ulrich Wickert, a mené une interview avec Eugène Ionesco dans son logement à Paris. Ulrich Wickert m'a donné son approbation de présenter cet entretien sur mon site.
Ulrich Wickert est également interrogé sur sa rencontre avec et sa fascination pour Eugène Ionesco dans une interview au Sonntagsblatt en 1998. Là, il a dit:
"J'ai rencontré Ionesco en privé alors qu'il avait presque 80 ans et j'ai continué à le voir jusqu'à sa mort. C'était un homme plein de peurs. J'ai beaucoup appris de lui dans nos conversations, sur la littérature, la pensée et les gens."
Interrogé sur les expériences mystiques décrites par Eugène Ionesco, Ulrich Wickert a déclaré:
"Cela avait à voir avec sa peur de la mort. Même en tant que jeune homme, il a vu une lumière. Toute sa vie, il a lutté avec la question de savoir si Dieu existe. Je soupçonne qu'il est mort sans croire en Dieu. Mais il a toujours cherché Dieu. Il m'a demandé si je croyais en Dieu. J'ai dit non."
Lorsqu'on lui a demandé s'il partageait les questions d'Ionesco sur Dieu et la foi, Ulricht Wickert a répondu:
"Je continue à me poser la question de Dieu. La question de la mort aussi. Il est sage d'y penser. Ionesco s'est demandé: est-ce que je reste ou est-ce que je ne reste pas? Cela inquiète beaucoup de monde. Vous savez d'où vous venez: de vos parents, grands-parents, etc. Être rappelé n'était pas une consolation pour lui."
La reproduction ou représentation de l'interview avec Eugène Ionesco est soumise à l'autorisation écrite d'Ulrich Wickert.
Dans la solitude je trouve l'homme.
Ionesco: ...Je pars. J'aime partir.
Wickert: Est-ce que c'est vraiment une question psychologique que vous aimez partir, aller quelque part, partir d'ici?
Ionesco: Oui, c'est une question psychologique. J'ai envie d'aller ailleur, de fuir. J'ai l'impression que si je reste sur place les dangers sont plus grands que si je circule. J'adore partir. Un poète français disait "Partir, c'est mourir un peu". Moi je crois au contraire: "Partir, c'est vivre un peu". Alors voilà. Je pars.
Wickert: Vous avez toujour aimé partir?
Ionesco: Toujours, j'ai toujour aimé voyager. Autrefois je voyageais très peu. Voyager était très cher. Je n'avais pas beaucoup d'argent. Mais maintenant j'ai de l'argent et on me paie les voyages en plus. Mais avant, quand je n'avais pas de l'argent on ne payait pas mes yoyages.
Wickert: Est-ce que ça vous êtes égal où vous allez? Surtout, la question est de partir?
Ionesco: C'est de partir mais pour aller connaître des lieux. J'aime connaître des gens. J'aime faire des choses, visiter des expositions, ècrire dans un hôtel de St. Gallen et voir des gens, connaître du nouveau. En voyageant j'ai l'impression que le monde redevient jeune ou redevient vierge. Je suis toujours à la recherche d'un nouveau monde. Je suis une sorte de Christoph Columbus qui cherche le nouveau monde, en suisse par exemple. Il le cherche où il peut. Mais ce qui est ennuyeux est qu'on ne trouve pas de nouveau. Que vous alliez en Allemagne, en Angleterre, en Amérique ou en Suisse. C'est toujours de Reagan ou de Gorbatechev qu'on en parle absolument partout. Et puis c'est des réfrigérateurs, et puis c'est des autoroute. C'est très difficile de voyager maintenant et de voir des localités intéressantes. Il faut faire des détours. Ils sont cachées. On a l'impression que le monde beau, que le monde à découvrir est caché. Autrement c'est sur l'autoroute, les autoroutes, et des avions. Celà amène de ne rien voir... Mais c'est très rare qu'on découvrit du nouveau dans les paysages et dans les villes qui commencent à tout se ressembler. Votre magnifique pays à l'Allemagne avait si belles villes. Il en restent quelques-unes mais la plupart sont devenues des petites New York, des villes en New York. Aussi si vous vous promener dans le désert. Oui, le désert c'est du nouveau. Une fois j'étais en Israël et le ministre de l'agriculture qui luttait contre le désert afin de gagner plus de terrain me demande: "Qu'est-ce qui vous a plu le plus ici en Israël?" Alors, bêtement je réponds au ministre: "Le désert." J'aimerais trouver un désert. On en trouve dans les grandes villes, mais c'est un autre désert, un désert bruyant. Je cherche un désert, un véritable désert. Le solitaire.
Wickert: Pourquoi est-ce que vous cherchez le solitaire?
Ionesco: Parce que dans la solitude je trouve l'homme. Dans les masses compactes je ne le trouve plus. Alors il y a des solitaires qui sont vraiment isolés et il y a des solitaires qui ont les pieds sur terre. Les vrais solitaires sont en contact permanent avec l'universe, un contact mystique ou réel.
Wickert: Où est-ce que vous vous voyez? Quelle sorte de solitaire vous êtes?
Ionesco: Par la force des choses j'essaie d'être un vrai solitaire, mais aussi par la force des choses je ne le suis pas. Je suis en contact avec les divers mondes - avec les journaux, avec les médias. Maintenant encore, vous voyez? Et je ne sais pas si j'ai l'impression que je conserve quelque chose de moi et de ce qui reste de moi. C'est à dire de ce qui est les autres, dans leur profondeur. Parce que le moi que je le vous ai dit n'est pas autant séparé de les autres et croise tous les autres en lui mêmes.
Wickert: Qu'est-ce que vous aimeriez trouver dans votre moi?
Ionesco: Dieu.
Wickert: Existe-t-il?
Ionesco: Il n'existe pas, il est. Il existe quand même. Mais il ne nous est accessible que par l'existence, l'existence de Jésus-Christ. Il nous est accessible parce qu'il est devenu un homme. Autrement il est une entité, un innommables, infini est infiniment indéfinissable. Mais il existe concrètement en son fils, il a bien voulu s'incarner.
Wickert: Si vous dites que vous aimeriez trouver dieu dans votre moi. Quelle est la chose réelle que vous croyez trouver là-dedans?
Ionesco: C'est très difficile à dire. Une lumière. Une présence. Ma fille voit dieu en regardant les icônes byzantines. Les yeux de Jésus dans les icônes. Elle a soudain l'impression d'une présence - et ça c'est dieu. Une présence. J'ai eu cette sensation il y a très longtemps quand j'avais dix-huit ans. Je me trouvais, j'ai raconté très souvent cette histoire, dans une petite ville de province, au mois de juin. Tout d'un coup la lumière est devenue èclatante, beaucoup plus brillant que le soleil. Et le linge qui pendait à sécher dans le cour de linge, le pauvre linge, semblait surnaturel. Tout me semblait extrèmenent beau. Et je sentait cette prèsence qui m'a fait dire, qui m'a fait penser: "Plus jamais je n'aurai peur de la mort.". Et quand je serai vieu, je me souviendrai de ce moment et je n'aurai pas peur. Mais celà n'est plus qu'un souvenir d'un souvenir d'un souvenir. Ce n'est plus ce moment. A partir du moment cette présence m'a quitté, tout ce phenomène mystique, surnaturel. Et après le soleil me semblait sombre. Mais ce sont des expériences très très rares, lumineuses et intenses. C'est ça qui vous empêche de mourir et qui vous faites espérer, malgré l'horreur du monde. Quelque fois on rêve. Un tunnel par exemple. A la fin du tunnel la lumière et on va vers la lumière. J'ai raconté ce rêve à des amis et il parait que ce rêve est archétypal, ce que je ne savait pas. Il apparait dans les moments de désespoir.
Ce que me rend heureux c'est d'écriver.
Wickert: Vous dites que vous avez beaucoup de chauchemars. Alors, qu'est-ce que vous rêvez. Des choses réelles ou des choses terribles que vous faites vous-même?
Ionesco: J'ai des cauchemars atroces. Et quand je me réveille j'ai l'impression que je suis encore dans le rêve, dans le rêve du cauchemar. J'en ai eu il y a peu de temps. Alors je me lève, je m'habille et vais à la salle de bain pour que le cauchemar se dissipe. Et enfin il arrive à se dissiper. Pour en tomber dans un autre, le cauchemar du quotidien. Parce que j'ai le sentiment que notre vie est absolument intolérable et que nous vivons l'enfer, depuis deux siècle surtout que les hommes font des révolutions qui finissent mal les unes comme les autres. J'ai vraiment l'impression que le monde est atroce. Sauf de rares moments atroces est merveilleux à la fois.
Wickert: Quels sont les contenus de ces cauchemars?
Ionesco: Des actes terroristes.
Wickert: Que vous faites ou que vous subissez?
Ionesco: Que je vis presque. Pas loin, 50 mètre d'ici, en septrembre dernier dans un magasin une catastrophe - rue de reine - énorme. Alors je ne sais plus si je suis dans le réel, dans l'imaginaire et je confonds le réel et l'imaginaire - et inverse. Non, la réalité, le réel est autre chose. Le réel est l'aujourd'hui. C'est la réalité et l'imaginaire que je confonds. Elles sont si atroces toutes les deux. Et dans mes rêves je vois des actes terroristes, je fais moi-même des choses horribles. J'ai quelquefois l'impression que je porte un crime en moi. Sans doute parce que l'humanité vit dans le crime.
Wickert: Est-ce que vous êtes pessimiste?
Ionesco: Je ne peux pas dire que je suis pessimiste. Je dis seulement que je suis étonné et étonné, effrayé et effrayé. Et je me demande combien de temps celà va durer. C'est ça l'enfer. L'enfer c'est la durée. L'enfer c'est la répétition. L'enfer est longue, tandis que l'éternité est un instant. L'éternité est hors du temps.
Wickert: Mais beaucoup de vos pièces finissent avec la mort.
Ionesco: Avec la mort ou avec la catastrophe. La catastrophe avec la mort dans "Tueur sans gage" il y a là une personnage qui demande du tueur pourquoi il tue. Il essaie de le convaincre de ne plus tuer. On comprend bien la parabole: L'homme et la mort - les deux façons tout à fait opposées de vivre. Vivre dans le mal, vivre dans la mort ou vivre dans la vie. Et vivre dans la vie c'est de trouver un printemps éternel, qui - quelquefois - se trouve dans nous mêmes. On peux le trouver, le printemps éternel. Celà mène à la catastrophe, comme dans ma pièce "Rhinocéros", dans les pièces gaies comme "La cantatrice chauve". C'est encore la catastrophe. C'est la catastrophe du language. Ce sont des gens qui sont là austèrement et qui disent de bêtises, des bêtises qu'on dit tout le temps. Et peu après les paroles mêmes se désarticulent. C'est la désarticulation du language, donc une sorte de désarticulation du monde. Mais cette désarticulation du language moi je l'ai décrivée gaiement.
Wickert: Là vous êtes gai. Vous montrez la destruction de la communication, du langage, mais vous le faites gaiement.
Ionesco: Oui, gaiement, avec insouciance. Comme si c'était naturel. Parce que j'étais jeune à ce moment là.
Wickert: Mais est-ce que vous étiez gai?
Ionesco: Non, je n'ai jamais été gai. Ce que me rend heureux c'est d'écriver. Le premier film que j'ai voulu faire comme j'avais dix ans. J'avais écrit le scénario moi-même. J'avais un copain qui avait onze ans, et qui disait qu'il avait un oncle dont il pouvait apporter une caméra. Alors je me souviens du premier scénario: Des enfants qui rendent visite à d'autres enfants, ils y trouvent les parents, jetent les parents et les immeubles par la fenêtre. J'avais déjà un sens du scandale et de la catastrophe. Donc c'était dans ma première pièce la désarticulation gaie, comme si je voulais faire conjurer le vide afin qu'il n'y ait plus de monde. Et qu'on se retrouve dans un autre espace, hors des objets, hors du monde, hors de ce monde dans un autre monde. Et puis j'ai continu à faire la dérision du langage. Même après avoir fait mes pièces idiologiques. C'est dans ma dernière pièce, qui s'appelle "Voyage chez les morts", qu'il y a un monologue final où le langage est complètement détraqué. Où le langage et le monologue est fait d'assonances, de mots inventés. Et c'est dit avec tragique, avec une énorme souffrance. Ce n'était plus la destruction par la joie, c'était la destruction par désespoir.
Je suis entré dans le milieu littéraire roumain et c'est là où j'ai écrit moi-même mes premières pages qui étaient une révolte. Une révolte contre la culture roumaine que je n'aimait pas. Je n'aimait pas non plus le monde littéraire roumain qui d'ailleurs était très ressemblant à tous les milieus littéraire du monde. C'est à dire qu'il y avait des qualités, de talents et même de genies, mais beaucoup, beaucoup de vanités. Je détestait ce monde. Et je détestait ce monde parce que je détestait la littérature en général. C'est pourquoi j'en ai fait. Mon accès à la littérature commençait par un combat contre la littérature qui se manifestait dans un livre qui s'appelle "Nu", c'est à dire "Non".
Et comme je suis devenu étudiant j'étais un étudiant trés aggressiv face aux professeurs. Je lisait d'autres livres que ceux ècrits par mes professeurs....Et j'aimait beaucoup Proust qui faisait son apparition et qu'on réputait pour le dernier des imbéciles. Il n'était pas compris.
Un homme qui a un certain sensibilité ne peux pas vivre dans ce monde. Ou il vit péniblement et mal.
Wickert: Vous racontez que vous aviez été toujours contre ce que les professeurs avait dit. Est-ce que vous avez toujours eu un esprit de contradiction?
Ionesco: Je crois avoir toujours eu un certain esprit de contradiction. Ça se voit aussi dans mes pièces de théâtre. Le personnage principal de "Jacques ou la soumission", qui s'appelle Jacques, est un révolutionnaire contre le monde. Ensuite j'ai écrit une nouvelle dont j'ai tiré un scénario. Et puis un film - que j'ai joué - qui s'appelle "La vase". Et dans ce film le personnage principal se démet, se démet moralement, spirituellement et physiquement, tant qu'il perd ses jambes et qu'il perd ses bras. Il ne lui reste plus que la bouche, un oeuil pour regarder le ciel et la bouche pour dire: "Je recommencerai. Je n'aime pas ce monde." Il demandait à dieu une autre manifestation. Un autre cosmos.
Wickert: Mais c'est quelque chose dans votre travail qui ne se mélange. La logique et ce qui vient interrompre la logique.
Ionesco: Exactement. Ce que je fais, ce que j'écris c'est d'abord - je suis un esprit naturellement sensé - est naturellement logique. Mais les bouffés irrationelles qui montent vers moi et vers la logique et la détruisent. Et c'est ainsi que mon théâtre est devenu ce qu'on appelle le "Théâtre de l'absurde". Et ceux qui ont fait après moi du "Théâtre de l'absurde" l'ont fait plus mal que moi. Parce que il y a beaucoup de gens qui m'ont suivi par imiter ce que j'écrivait et s'essayer de faire de l'absurde pendant que chez moi l'absurde venait de la confrontation entre l'irrationnel et le rationnel. L'irrationnel qui montait vers le rationnel, comme vous venez de le dire.
Wickert: Est-ce que vous acceptez ce mot "Théâtre de l'absurde" pour vous?
Ionesco: Je l'accepte. Bien entendu. Je trouve que le monde entier est absurde - ou non pas absurde. Car il est difficile à dire que quelque chose est absurde quand nous n'avons pas de modèle de ce qui n'est pas absurde. Mais enfin le monde ne me plaît pas. Il ne me convient pas. Il est insensé. Et dans la mesure que je reflète les structures de l'esprit j'ai le droit de le trouver absurde. D'ailleur le "Théâtre de l'absurde est inventé depuis longtemps. Sophokles faisait du "Théâtre de l'absurde" et Shakespeare le définit, le "Théâtre de l'absurde". Il fait dire à MacBeth: 'Le monde est une histoire raconté par un idiot, plein de bruit et de non-sens et qu'il ne signifie rien" - ou quelque choses comme ça. Je ne connais pas la citation exacte. Mais c'est ça le sense du non-sens défini par Shakespeare.
Wickert: Est-ce que dans les salons littéraires il y avait des querelles littéraires? Est-ce que Jean Genet était invité?
Ionesco: Genet était très joli dans les salons littéraires. Il avait été un bandit. Je crois même qu'il avait été comdamné à mort. Mais je n'en suis pas sûr. Enfin il avait été sauvé grace à son talent. Parce que il avait eu du talent, du genie avec un grand pouvoir et il avait un grand rayonnement à l'époque. Mais quand Genet venait dans un salon il se bornait à voler des cuillères. Et le lendemain la maîtresse de maison téléphonait et demandait à la maîtresse qui avait rècu Genet un autre fois: 'Qu'est-ce qu'il a volé chez toi?'
Wickert: Alors c'ètait important qu'il avait volé quelque chose de valeur. Cela donnait de valeur à l'hôtesse?
Ionesco: Oui, ça donnait de la valeur à l'hôtesse.
Wickert: Pourquoi est-ce que vous n'avez pas aimé Sartre?
Ionesco: Je ne l'ai pas aimé pour plusieurs raisons. C'est parque il changeait de couleur politque en permanence.
Wickert: Est-ce que Sartre était un personnage difficile quand on le rencontrait?
Ionesco: Oh non, mais on ne s'est pas vu très souvent. Mais j'ai entendu dire qu'on le considère comme le plus poli, le plus gentil du monde. Il avait pour moi une faiblesse. Mais à cause de ses changements permanentes, de ses contradictions permanentes moi je ne l'aimait pas. Cependant j'étais le seul ècrivain avec lequel il laissait jouer ses pièces. Donc il avait une sympathie pour moi. Et je rêvais de lui quelque temps avant sa mort et je lui ai dit - nous étions dans un théâtre - je lui ai dit: "Mais il n'y a personne dans ce théâtre pour moi." Et Sartre disait: 'Mais oui, regardez, sur l'Olympe, plein de gens." Et je dit à Sartre, dans mon rêve: "Comme j'aurais voulu vous connaître." Et il m'a repondu: "Trop tard. Trop tard." Parce que après avoir lu "La nausée" je l'aimait, mais non pas après "L'être et le néant" où il n'y a plus d'amitié entre les hommes, seulement des rapports de force. Après ça il a écrit d'autres livres. J'ai voulu en effet le connaître. Et il me manque, il me manque pour ma galerie d'écrivains et d'artistes parisiens.
Ionesco (au sujet de la peinture): Je peins parce que c'est une thérapeutique. Une excellente thérapeutique.
Wickert: Thérapeutique pourquoi?
Ionesco: Pour mes angoisses. Contre mes oppressions. Trop d'angoisses. Je suis débordé d'angoisses. Je ne pouvais plus vivre, tant j'avais des angoisses et des dépressions. Qu'elles sont justifiées quand je vois l'état du monde. Un medicin psychologue m'a dit: "Les névrosés ont raison." On essaie quand même de leur donner des médicaments pour cacher leur raisons. Parce que le monde est insupportable. Un homme qui a un certain sensibilité ne peux pas vivre dans ce monde. Ou il vit péniblement et mal. Et je vivais mal. Alors c'était une thérapeutique d'abord. Et aussi c'était mon horreur de la bavardage. Parce que j'avais écrit des pièces de théâtre pendant 30, 35 ans. Et il se parlait, se parlait, se parlait. J'avais horreur des mots. Ça faisait beaucoup de bruit. Alors j'ai eu besoin de silence. Et maintenant j'ai le silence. Sauf quand je vous parle.